Après la chute de Rome en 476, la restauration d’un Empire d’Occident en l’an 800 par Charlemagne, un Franc, un Germain romanisé, dès le regrettable Traité de Verdun de 843 par lequel ses petits-fils se sont partagés l’empire, les rois de la partie qui deviendra la France n’ont eu cesse de combattre l’Idée Impériale romaine. Moins d’un siècle plus tard, cet empire avait disparu et c’est un descendant des Saxons non romanisés qu’il avait contraints de se baptiser, Othon le Grand, qui avait restauré en 962 cet Empire Romain sous la forme de ce qui s’appellera peu à peu le Saint Empire Romain Germanique non pas simplement parce qu’il n’aurait comporté que des peuples germaniques- ce qui n’était pas le cas- mais parce qu’en revanche les peuples germaniques y étaient majoritaires et surtout les nobles qui en étaient majoritairement issus vouaient une grande admiration à l’égard de l’Empire Romain et avaient la volonté de le perpétuer, ce qui n’étaient pas l’apanage des peuples devenus latins qui avaient oublié eux un peu vite ce qu’ils devaient à Rome.
Ce «Saint-Empire romain germanique», ne fut jamais une entité unifiée, centralisée à la différence du Royaume de France/Frankreich mais il fonctionnait relativement bien pour l’époque, de son début jusqu’à la fin du règne des puissants empereurs Hohenstaufen, soit pendant près de trois siècles.
Après un interrègne de moins d’un quart de siècle, les puissants Electeurs constitués alors de la Haute Noblesse de l’empire avait cru le maintenir dans un état de faiblesse en élisant en 1273 un comte relativement peu puissant à l’époque, Rodolphe de Habsbourg, premier d’une longue lignée d’empereur à la tête de l’Empire dont les rois de France se considéreront les rivaux et affaibliront jusqu’aux Traités de Westphalie de 1648 mettant fin à une Guerre de Trente Ans à laquelle la France avait pris une part active, qui ont non seulement donné l’indépendance aux Pays Bas et à la Confédération Helvétique mais ont surtout permis à d’autres Etats membres du Saint Empire telle le duché de Savoie d’acquérir une quasi entière souveraineté marquant ainsi le recul de l’intégration des Etats européens qui n’avaient pas encore pris leur caractère national dans ce qui aurait dû évoluer en une sorte de Confédération puis Fédération sur le modèle de la Confédération Helvétique crée en 1291.
Si la Gaule romaine s’appelle aujourdhui la France et les Gaulois des Français c’est bien en souvenir de ces Germains dénommés Francs dont était issu cet empereur Charlemagne que ces Gaulois romanisés puis francisés s’« approprient » un peu outrageusement dans la mesure notamment ou ils ne semblent pas partager majoritairement encore aujourdhui l’ambition qu’il a eue de vouloir restaurer l’empire romain d’occident ; bien au contraire leurs rois pourtant d’ascendance germanique, sauf à tenter de se faire élire empereur comme François Ier et Louis XIV, ont combattu pendant des siècles cet empire romain germanique qu’Othon le Grand, un Saxon a voulu perpétué, alors que leurs premiers rois descendaient pourtant d’un autre Saxon, Hugues Capet. Et ce jusqu’à son abolition en 1806 sous la contrainte de Napoléon qui lui sera le premier français à repenser à cette Idée Impériale romaine mais en instaurant sur l’Europe un Empire français centralisé.
A l’occasion du 50° anniversaire des Accords franco-allemand, ils paraient bon que l’on rappelle aux Français si prompts à critiquer les Allemands que les ravages des guerres nationales engagées par la France depuis son entrée dans la guerre de Trente Ans en 1635 jusqu’à la bataille de Waterloo en 1815 ont fait perdre à une Allemagne, qualifiée après 1870 de plus belliqueuse que la France, plusieurs millions d’habitants.
Les Français s’abstiennent d’interpréter étrangement le fait que symboliquement les Allemands aient fait choix de proclamer le Deuxième Reich prussien à Versailles dans le château construit par Louis XIV, à moitié Habsbourg par sa mère, et qui avait annexé par la force l’Alsace et la Franche Comté qui appartenaient légitimement aux Saint Empire. Deuxième Reich proclamé à la suite d’une guerre perdue par la France que son empereur Napoléon III avait déclarée bien imprudemment après s’être abstenu stupidement dix ans plus tôt d’intervenir en faveur de l’empire des Habsbourg pour empêcher le désastre de Sadowa ou ils furent vaincus par la Prusse montée en puissance depuis des siècles avec l’aide indirecte de la France.Pourtant c’est tout aussi symboliquement que les Français ont fait signer à Versailles le traité mettant fin à la Première Guerre mondiale dépeçant l’empire des Habsbourg et mettant à la charge d’une Allemagne à genou, ayant mis fin au Deuxième Reich, des indemnités colossales à l’origine du climat ayant permis à un Autrichien dérangé d’ambitionner la création d’un III° Reich.
Par un singulier retour de l’histoire, comme en 1273, les grands chefs d’Etat de l’Union Européenne n’ont pas voulu élire en la personne de Monsieur Hermann von Rompuy un trop puissant Président du Conseil Européen qui aurait pu se montrer trop ambitieux pour une Europe qu’ils croient toujours pouvoir rester une Europe des Nations à une époque où les états nationaux s’avèrent parfaitement incapables de remplir leur rôle à l’égard de leurs nationaux.
Pourtant n’en déplaise au très jacobin Monsieur Chevènement, alors Ministre de l’Intérieur français, la réflexion qu’il avait faite il y a maintenant plus de dix ans au sujet du projet de constitution de Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères allemands de l’époque Joschka Fischer : « Les Allemands ne vont pas nous refaire le coup du Saint Empire » apparait aujourd’hui particulièrement peu visionnaire.
Le Nationalisme n’est plus dans nos démocraties occidentales incarné que par les slogans utopistes des partis d’Extrême droite ou d’Extrême gauche.
Force est d’admettre aujourdhui, y compris par Monsieur Chevènement, et par son collègue Monsieur Fabius, ancien Premier Ministre français et actuel Ministre des Affaires Etrangères qui s’est opposé au projet de Constitution Européenne élaboré ensuite pourtant sous la direction de l’ancien Président français Monsieur Valérie Giscard d’Estaing, que le retour d’un Nationalisme « franchouillard » ne constitue pas une alternative à la crise actuelle qui exige non pas « moins d’Europe mais plus d’Europe » et qu’une telle crise né d’un endettement exagéré des Etats ne se serait certainement pas produite si les projets de création d’un Etat Fédéral Européen ne s’était pas heurté à leur opposition consternante que l’on peut qualifier aujourdhui de coupable faute d’avoir été capable de proposer une alternative crédible aux besoins d’intégration européenne.
Force est de constater qu’un des aspects les plus remarquables du peuple allemand est son stupéfiant rétablissement et sa transformation sociale, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale alors et pourtant qu’elle a dû payer pendant ces vingt dernières années l’Allemagne le cout énorme de sa réunification tout en continuant de rembourser des indemnités de guerre de la Première et de la Deuxième Guerre.
Mais force est également de constater que de son côté la France n’a cessé de décliner, s’est considérablement désindustrialisée depuis la Première Guerre mondiale, vit à crédit depuis 40 ans et malgré une crise qui la place dans une situation équivalente à celle d’une sortie de guerre refuse d’affronter la réalité en évitant même de qualifier de politique d’austérité et de rigueur, mais simplement d’efforts, la politique indispensable à son redressement pensant toujours de manière irréaliste qu’elle pourrait encore inventer un nouveau modèle français qui s’imposerait à l’Union Européenne au lieu et place du modèle allemand qui a fait ses preuves quand le sien prétendument social a lamentablement échoué quels qu’aient été les gouvernements de droite ou de gauche qui l’ont mis en œuvre. Et ce alors que ses sœurs latines l’Italie en tête, puis l’Espagne mais également le Portugal reconnaissent davantage le bien-fondé actuel du comportement de l’Allemagne.
Quel rôle l’Allemagne jouera-t-elle alors au 21ème siècle ? Verrons-nous une Allemagne « européanisée » s’impliquant dans la construction d’un continent uni, ou verrons-nous, une fois encore, une Allemagne essayant de dominer l’Europe ?
Rappelons-nous simplement que mis à part la parenthèse nationaliste nées des ambitions hitlériennes d’instaurer un III° Reich centralisé qui a fait perdre à l’Allemagne une grande partie de sa population et plus d’un tiers de son territoire, et terni trop longtemps son image, les Allemands ont toujours été respectueux d’une certaine forme de démocratie incarnée par cette forme de fédéralisme du Saint Empire, de la Confédération du Rhin et de l’Empire Austro-Hongrois et sa constitution fédérale actuelle plus respecteuse de l’identité des peuples que le modèle incarné par la royauté française ou la république jacobine actuelle.
Comment les médias français peuvent-ils encore qualifier de « Couple franco-allemand » le résultat d’Accords entre l’Allemagne et la France qui ne cessent, plus particuliérement cette derniére, de vouloir conserver une pleine indépendance et continuent depuis 50 ans d’avoir des politiques divergentes se refusant à partager comme dans un couple un même projet.
La France et avec elle l’Europe a bien besoin d’un nouveau Grand Charles pour convaincre les Européens de la nécessité de restaurer l’empire romain non sous la forme d’un nouvel empire français ni celle d’un empire romain germanique mais bien d’un Empire Romain Européen si elle ne veut pas que son déclin depuis le début du 20° siècle ne lui fasse perdre toute influence dans le monde au cours de ce 21° siècle tandis que l’Allemagne dont la Chancelière bénéficie du soutien des deux tiers de ses compatriotes aura retrouvé celle qu’elle avait sous le grand Habsbourg ,Charles Quint.