Alors que le projet de réforme territoriale française entre dans sa phase parlementaire, il convient de prendre la peine, au-delà de l’importance incontestable du facteur identitaire, d’examiner les critères d’importance de la population et de superficie des territoires des Régions françaises avant de décider que le critère technocratique français selon lequel « Big is Beautiful » est pertinent.
On relèvera tout d’abord qu’au sein de l’Union Européenne, 12 des 28 Etats membres ont une population inférieure à celles des Régions Iles des France et Rhône-Alpes.
A savoir :
Etats Membres Population
( chiffres arrondis)
Danemark 5.6
Slovaquie 5.5
Irlande 4.9
Croatie 4.5
Slovaquie 5.5
Lituanie 3.5
Lettonie 2.2
Slovénie 2
Estonie 1.25
Chypre 1.2
Luxembourg 0.5
Malte 0.4
On relèvera également que ces deux régions françaises ont une population supérieure à 3 régions européennes qui aspirent à devenir indépendantes des Etats Membres auxquels elles appartiennent :
Catalogne 6
Ecosse 5
Flandre 6.2
Régions françaises Population Superficie
(continentales) ( en millions) ( en km2)
Iles de France 12 12 000
Rhône-Alpes 6 43 000
Provence-Côte d’Azur 5 31 000
Nord-Pas de Calais 4 12 500
Pays de la Loire 3,5 32 000
Aquitaine 3.2 41 000
Midi-Pyrénées 2.8 45 000
Languedoc-Roussillon 2.6 27 000
Centre 2.5 39 000
Lorraine 2.5 23 500
Picardie 1.9 19 000
Alsace 1.9 8 000
Haute Normandie 1.8 12 000
Poitou Charente 1.7 26 000
Bourgogne 1.6 31 500
Basse Normandie 1.5 17 500
Champagne Ardenne 1.3 25 500
Auvergne 1.3 26 000
Franche Comté 1.2 16 000
Limousin 0.75 17 000
Länder allemands
Rhénanie du Nord- Westphalie 18 34 000
Bavière 12.5 70 500
Bade-Wurtemberg 11 36 000
Basse-Saxe 8 48 000
Hesse 6 21 000
Saxe 4.2 18 500
Rhénanie-Palatinat 4 20 000
Berlin, Ville-Etat 3.5 900
Schleswig-Holstein 2.9 16 000
Brandebourg 2.5 29 500
Saxe-Anhalt 2.5 20 500
Thuringe 2.4 16 000
Hambourg, Ville-Etat 1.8 750
Mecklembourg-Poméranie Orient. 1.7 23 000
Sarre 1.1 2 500
Brême, Bremerhaven 0.7 400
Alors que le gouvernement français prétend souvent vouloir « rattraper » le modèle allemand en ce qui concerne la taille pertinente des régions, force est de constater que les Länder allemands sont de tailles très variées très proches de la variété que l’on retrouve dans la taille des Etats Membres eux-mêmes, seuls 4 sur 16 dépassant celle de Rhône-Alpes et 2 celle de l’Ile de France. De même les 17 Communautés espagnoles ont des populations qui varient entre près de 8 millions pour la plus peuplée l'Andalousie et moins de 0.5 millions pour la plus petite dont 4 avec moins de 1 million. De même également les 20 Régions italiennes après réforme comptent entre 9,5 millions d'habitants pour la plus grande la Lombardie et encore moins de 0.5 million pour la plus petite avec 5 régions de moins de 1 million.
En fait l’on constate dans l'Union Européenne à partir de ces statistiques que quel que soit son statut actuel, l’Etat Membre, la Région-Länder,, Ville-Etat, type moyen se situe entre 2 millions à 3 millions d’habitants ce qui correspondrait en France au regroupement de 3 à 6 départements et non à la constitution d’Hyper régions telle que par exemple Rhône-Alpes +Auvergne regroupant 12 départements et totalisant 7.3 millions d’habitants sans atteindre pour autant l’objectif affiché de la Bavière ou du Bade-Wurtemberg qui constituent 2 des 4 Etats de taille exceptionnelle sur les 16 que comptent l’Allemagne Fédérale.
Si l’objectif de regrouper Basse et Haute Normandie, Bourgogne et Franche Comté (ex-comté de Bourgogne) Picardie avec Nord-Pas de Calais, Loire Atlantique avec la Bretagne peut donc paraitre pertinent, tout le reste apparait comme une nouvelle réforme de technocrates jacobins qui se moquent comme toujours de préserver aux régions françaises leur identité régionale lesquelles ont pourtant une grande importance sur le plan économique, à l’heure pourtant ou ces mêmes technocrates crient contre les atteintes que l’Europe ferait courir aux identités nationales.
Au nom de la préservation de ces identités importantes donc non seulement sur un plan démocratique mais également économique, peut-on refuser aux départements basques, savoyards de ne pas avoir le droit d’être des régions à part entière comme la Corse au seul motif qu’ils ne sont pas sur une Ile comme celle-ci ou les départements d’Outremer et s’agissant des Savoyards, après les avoir fondus contre le gré de la grande majorité silencieuse dans une Région Rhône Alpes, et les noyer dans une Hyper Région Rhône Alpes Auvergne ?
A tout vouloir leur faire accepter, ils finiront par penser qu’il serait un moindre mal d’être intégrés à une région Savoie-Dauphiné-Valentinois-Nice-Provence !
Une France à 16 régions comme l’Allemagne entre 1.5 millions la plus petite et 12 comme l’Ile de France doit être un objectif plus acceptable dans le sens de la conciliation dont ont particulièrement besoin aujourd’hui les Français qui restent attachés beaucoup plus encore aujourd’hui à leur région qu’à leur département. ( On est breton avant d’être finistérien, bourguignon avant d’être côte d’orien, alsacien et pas bas-rhinois ……). Plutôt que de demander aux Régions actuelles de fusionner, il aurait certainement été plus intelligents de demander aux départements de décider quelle nouvelle Région ils estimaient interessant de constituer entre eux.